Le nom du père
Le nom du père. Cette expression cache un geste très répandu dans les campagnes jusqu’à la seconde guerre mondiale : le signe de la croix. On faisait le nom du père et parfois on le disait. L’histoire qui suit a largement dépassé le cadre du Pàys du Tseu ; en voici une version tseu.
Un tire-veurtiaux accompagné de deux témoins est venu déclarer la naissance de son héritier à la mairie récemment construite ; il est en vêtements de travail et en sabots, comme ses accompagnateurs et il tient sa casquette à la main, tout comme eux. Le nouvel instituteur, qui vient d’arriver de la ville et qui a été appelé à tenir la fonction de secrétaire de mairie, s’apprête à procéder à l’enregistrement de la naissance sur le registre d’Etat Civil.
- L’instituteur. Quels prénoms donnez-vous à l’enfant ?
- Le père, qui s’efforce à prononcer correctement. Dzean, Gllaude, Antoîne, Michel, Philibert.
- L’instituteur, commençant à écrire. Le nom du père ?
- Les trois hommes se regardent, ébahis, puis ils font le signe de la croix, en silence.
- L’instituteur, qui n’a rien vu, répète. Le nom du père ?
- Les trois hommes intimidés, se signent à nouveau.
- L’instituteur, levant enfin la tête. Je vous demande le nom du père, vous ne comprenez donc pas ce que je vous dis ?
- Le père, timidement. Mâs, y’est qu’nos l’ans fait tos les trâs.