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Le pays du Tseu

"Poûrre bête"

18 Avril 2014 , Rédigé par michel lapalus Publié dans #Textes

"Poûrre bête"

Cette petite photo apparaît bien belle et bien tranquille. Mais la couleur de cette eau boueuse semble indiquer un remous dans la vase et cacher quelque chose.Voilà l'histoire : une histoire de violence, de matchisme, de brutalité, de viol, de vengeance. Je pense qu'il n'est pas nécessaire de montrer des photos de violence et de guerre. On n'en voit que trop sur les écrans. Pas la peine d'en rajouter...

Poûrre bête

Al corre , al corre la B’nate. Al a pri l’senti qu’londze l’étang à la corne du bos. Y è qui fau qu’al corre la B’nate ; dri leuille y a un homme du tsatiau, à tsvau, que s’rapprotse. Y é stu-là que sondze ranqu'à retrossi les biaudes des ch'tites bredzires.

Elle court, elle court la Benoîte. Elle a pris le sentier qui longe l'étang au coin du bois. Mais, il faut qu'elle court la Benoîte ; derrière elle, se rappoche l'homme du château monté sur son cheval. C'est lui qui ne pense qu'à courser les gamines qui gardent leurs chèvres et leurs moutons.

Al va pas pòya corri bié du temps, y é seûr ; al boffe, al boffe c'man eune vieuille feune qu’vin d’corri après eune polaille.

Elle ne va pas courir longtemps, c'est sûr ; elle souffle, elle s'éssouffle comme une vieille femme qui vient de courir après une poule

Ma la B’nate, al a biau boffé, al a pas predu la tête. Al sa bin o qu'al va ! Y a un endreu o qu’le senti d’vin étreu, pi o qu’l’éille a creusi so l’pion du senti . Y é là qui va tsandzi . Le ts'vau quille su l’pion, l’homme essàye ben d’le r’teni, ma y é trop târd. Le ts'vau débaroule dans l’éille, pi c’mmence à s’enfonci dans la borbe. L’homme a biau s’dém’né, pu o s’démeune pu l’tsvau l’enmeune davu lu. Y a quasiman pu qu’ la tête que nos vouâ u d'ssu d’l’éille.

Mais la Benoîte a beau être essoufflée, elle n'a pas perdu la tête. Elle sait où elle va ! A un endroit où le sentier devient étroit, l'eau a creusé sous la berge. C'est là que tout va changer. Le cheval glisse sur l'herbe, l'homme essaye de le retenir, mais il est trop tard. Le cheval tombe à l'eau et commence à s'enfoncer dan la vase. L'homme tente de s'échapper, mais plus il s'agite, plus le cheval l'entraîne avec lui. Il n'y a plus que la tête qui dépasse au-dessus de l'eau.

_Tend m’don eune partse pe m'sorti d’itié...

_T’é bié o qu’t’é ; t’a étranyi ma sue y a quéques mois, fau bin qu’y s’pàye !!

_Dz’va t’laissi des târres, ranqu’pre ta..

_Garde tes târres ; t’s'ra bié à dreumi dans la borbe u fond d'l'étang !!

_Tends-moi une perche pour me sortir de là...

_Tu es bien où tu es ; tu as étranglé ma sœur, il y a quelques mois, il faut bien que tu payes !!

_ Je vais te donner des terres, elles ne seront qu'à toi...

_Gardes tes terres ; tu seras bien à dormir dans la vase au fond de l'étang !!

Les d'rris virons d'éille s'arrêtan ; l'étang a envalé le ts'vau pi l'homme du tsatiau.

Les derniers tourbillons disparraissent ; l'étang a avalé le cheval et l'homme du chateau

« Poûrre bête... » qu'al a dé la B'nate. Y éto p'la mô du ts'vau … !

« Pauvre bête... » a dit la Benoîte. C'était pour la mort du cheval... !

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L
On se sent vite absorbé par cette histoire.
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