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Le pays du Tseu

LE TOUR DU PROPRIETAIRE

8 Novembre 2013 , Rédigé par Eric Condette Publié dans #Textes

LE TOUR DU PROPRIETAIRE

Au centre de tout, se trouve d'abord la « maison », terme qui inclut le bâtiment lui-même et la pièce principale, à la fois cuisine, salle à manger et, autrefois, chambre à coucher.

A l'entrée, une louche appelée « bassin » était suspendue au dessus d'un seau, « eune seuille » d'eau fraîche. Cela permettait aux gens de se « déssàyi » (de se désaltérer), en rentrant des champs. D'une maison mal tenue, où règne le désordre, on dit encore aujourd'hui que tout y est « bassin p'seuille »; mot à mot que la louche est à la place du seau ... et inversement.

Dans un coin de la pièce se trouve la « bassie » (l'évier) sous laquelle il y a souvent une "cheurtire" (une cuve à cendre). Dans le fond trône la « fòyesse » (le foyer) ou la « tseûv'née » (la cheminée) autour de laquelle il était bien agréable de se regrouper pour se « rétsindre u quart du fu » (se réchauffer au coin du feu) « p’fare la « v'yie » (pour faire la veillée) en mangeant des « tsateugnes » (des châtaignes).

Le mobilier est assez rudimentaire et se limite à l'essentiel : une « traubye » (une table) et quelques « tsires » (chaises). Dans certaines maisons c'était naguère la « pâtire » (le pétrin) qui faisait office de table. Il y a aussi un buffet ou une armoire et parfois dans la même pièce le "yét" (le lit), au chevet duquel un « beun'ti » (bénitier) était garni d'une branche de buis des Rameaux. Chaque maison possédait bien sûr un « r'lodze » (une horloge, mot masculin en patois, tout comme en vieux français).

Sous le même toit, une partie du bâtiment est réservée à la grange, avec le « f'nau » (le fenil) et le « greni » (le grenier). La partie supérieure de la grange s'appelle le « soli ». C'est également dans cette partie du bâtiment que se trouve « l'ékeûrie d'vatses »ou encore « l’étraubye » (c'est à dire : l'étable).

Dans la « cô » (la cour), on voit « l'ékeûrie d'cotsons » (la soue à porcs), devant laquelle se trouve un "treûyon", petite cour fermée où l'on donne à manger aux porcs. Non loin de là il y a le « forni » (la chambre à four) où l'on cuisait le pain. C'est dans un coin du « forni », la « souillarde », que l'on prépare la pâtée des « polailles » (les poules) et des "cotsons" (les porcs); les « treuffes » (les pommes de terre) étant cuites dans un gros chaudron : la « tsaudire ».

Quelques pas suffisent pour se rendre de la maison jusqu'au « dzèrdin », jardin qui peut tout aussi bien être verger que potager et où l’on trouvent toutes sortes de bonnes choses : treuffes, pastonades (carottes). Celui-ci est souvent aménagé dans une « veurtsire », un lopin de bonne terre à proximité de la maison.

Un peu plus loin, il y a le « pâqui », petit pré dans lequel l'eau d'une source alimente une sorte d’abreuvoir en pierre : la « batsesse », aussi appelée « l’audzire ». A côté, on notera encore la présence d'un « sagnet », petit enclos réservé aux porcs.

Anciennement, il y avait fréquemment une « tseun'vire » (une chènevière) et occasionnellement « dou qnat’ ceupes de veugne » (quelques ceps de vigne). (On remarquera que le mot "cep" est féminin en patois). Souvent, ces vignes étaient plantées en noah et ont disparu lorsque la culture de ce plant a été prohibée à partir de 1935.

Enfin tout alentour s'étendent les « tarres », les champs cultivés, et les prés, ces derniers étant le plus souvent bordés de « boutseûres » (de haies), ce qui donne à notre paysage son aspect de bocage. Quelquefois les prés sont délimités par des murs en pierres sèches : les « meurdzis ». Il y a aussi quelques friches : les « solins ».

Les limites des terres sont depuis toujours marquées par des bornes. Pour éviter que ces bornes ne soient abusivement déplacées, l'usage consistait à fendre une pierre en deux et à enterrer les morceaux de part et d'autre de la base de la borne. Ces témoins de la borne s'appellent dans le pays des « garrons ». Pour vérifier qu'une borne n'avait pas été déplacée, on devait pouvoir retrouver et rassembler les deux morceaux de la pierre, qui étaient censés s'emboîter parfaitement. L'expression qu'on employait alors était:

« Y faut qu'is s'di'int » (il faut qu’ils s’assemblent bien).

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O
Oh, comme j'aime ces beaux dessins !
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L
Merci pour ces encouragements, mais je suis encore bien loin d'égaler l'Oncle Dan !
L
A Trambly, la moitié des maisons étaient de type maconnais- au sol, cave, écurie, grange, au-dessus de la cave la cuisine-chambre avec un escalier pour y accéder. Ce qui ne devait pas être le cas à Trivy.<br /> La patée des &quot;polailles&quot; s'appelle aussi la&quot;bouénèsse&quot;, un mélange de &quot;treufes brailli davu du son pi des eurties o des tsous&quot;<br /> Le garant ou garont était la garantie de la limite de propriété; dans les bois, le garant était un arbre &quot;r'ceupé&quot; (taillé ) à un mètre de hauteur tous les deux ou trois ans
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L
C'est vrai; la quasi-totalité de l'habitat rural de Trivy est de type charolais (même si quelques traces de l'influence mâconnaises subsistent ci et là). <br /> Je me souviens qu'à Brandon, mon grand oncle (l'onçhye Yaudu) habitait une maison typiquement mâconnaise avec un escalier à galerie etc.)<br /> En tout cas la recette de la bouénesse est drôlement roborative. Elle doivent être costaudes les polailles de Trambly!
A
Et bé bravo pour cette belle tranche de vie de campagne ! Le ch'tiot crobard Olivier il est de toi ?
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O
Les commentaires s'emmêlent ! J'en avais posté un, disparu, puis un second et en le postant celui d'Eric apparaît, qui nous apprend qu'il croque bigrement bien, l'animal !
O
Que nenni ! Je n'ai pas ce talent. Peut-être d'Eric ?
E
L'ptiet crobard est d'ma (pas de soucis de droits d'auteur, donc); y en aura ptêt' bin encô dou-quat' c'ment çan. <br /> Il s'agit d'une vieille bâtisse qui tombait déjà en ruines quand je l'ai croquée à la fin des années 80. Anciennement connue comme &quot;la maison du Père Platet&quot;, elle est située à côté de l'étang de la Vernée à la limite entre Trivy et Dompierre-les-Ormes. Je ne sais pas dans quel état elle peut être aujourd'hui..
O
Le texte est de mon complice Eric, le crobard, zdz'en sais ren&quot; !
E
Patience, la ménagerie (ou le bestiaire) arrive au grand galop; totes notés bêtes s'rant dachtôt itié!
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O
Quoî don qu'sant les bétes ? Is sant bié catsies, mas dz'cras bin qu'l'Eric vout pas tarder à nos en causi itié !
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